Face au risque de disparition du macronisme, Macron est « débranché » de la campagne, tandis que dans les rangs, c’est le sauve-qui-peut.
Après le choc et la sidération, les langues se délient en macronie. Ce dimanche, l’un des piliers du gouvernement, Bruno Le Maire prenait ouvertement ses distances avec Macron en affirmant sur BFM-TV : « C’est la décision d’un seul homme.
Lire aussi :
Ce que je constate, c’est qu’elle a créé dans notre pays, partout, de l’inquiétude, de l’incompréhension, parfois de la colère ».
Proche de la rupture, la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, après avoir un temps cultivé le doute sur sa candidature, se représentera mais à reculons aux législatives, tout en étant au clair sur ses dissensions : « Je ne suis plus en phase avec Emmanuel Macron », expliqua-t-elle devant des militants.
Hors Sujet
Certains de l’aile « gauche » ont même franchi le rubicon. L’ancien ministre de la Santé, Aurélien Rousseau portera pour ces législatives les couleurs du « Nouveau Front Populaire ».
Depuis la dissolution, « C’est le Titanic », résume Marlène Schiappa, l’ancienne secrétaire d’Etat, au journal Le Monde : « Certains, à l’orchestre, joueront jusqu’à la dernière minute quand d’autres poussent des passagers par-dessus bord pour accéder aux canaux – et canots – de sauvetage. »
Plus le temps passe, et plus les hypothèses sur lesquelles s’appuyaient Macron pour justifier sa dissolution semblent s’infirmer.
Le chef de l’Etat a d’abord parié sur le maintien des divisions de la gauche et une campagne électorale « Blitzkrieg » pour incarner un « bloc central », mais le « nouveau Front Populaire » est venu bousculer ses plans.
Ensuite, Macron a misé sur le caractère spécifique des législatives pour remédier à la répétition du scénario des européennes, mais la plupart des projections semblent confirmer une continuité du vote RN.
Enfin, le coup de force d’Eric Ciotti a alimenté un instinct de préservation de l’appareil au sein de LR empêchant l’opération d’OPA que Macron comptait faire sur le parti de la droite traditionnelle.
Ainsi, plus le temps passe et plus le « coup » de génie qu’ont voulu y voir ceux qui ont fomenté la dissolution apparait comme une illusion, sinon comme un échec sur toute la ligne.
Le risque insensé pris par le chef de l’Etat avec la dissolution et l’infirmation de l’ensemble des hypothèses qui l’avaient motivée semblent avoir discrédité comme jamais Macron auprès des siens.
Alors que l’actuel chef de l’Etat comptait une nouvelle jouer un rôle clé dans la campagne des législatives, envisageant « trois interventions par semaine jusqu’aux élections législatives », ce sera finalement Gabriel Attal qui mènera la danse et comme il l’entend : après avoir hésité à démissionner, pour mieux garder ses chances en vue de 2027, « le premier ministre [a finalement] décidé de rester, à ses conditions » note Le Monde. Prié par ses troupes de ne pas s’afficher dans la campagne, Macron devrait rester en retrait du « vaudeville politique » comme le titre L’Opinion et en coulisse de la campagne.
En clair, alors que Macron voulait reprendre la main, il se voit évincé du combat électoral.
Sur le terrain, les ministres et députés sortants de la majorité présidentielle cherchent également à se dissocier de l’étiquette portée par Macron. Comme le relate Médiapart : « Craignant l’effet repoussoir du chef de l’État, la plupart des candidat·es investi·es par la majorité n’ont pas souhaité mettre sa photo sur leurs documents de campagne.
Même effacement dans les déclarations de candidature, les vidéos et les professions de foi : les membres du camp présidentiel ont lancé leur campagne sur leur nom, leur ancrage et leur bilan, sans aucune mention ou presque de leur appartenance à la majorité.
« Je me présente devant les électeurs […] avec toute ma liberté de pensée, de ton et d’action », explique par exemple Olivier Véran dans Le Dauphiné, appelant à « dépasser la logique des partis ».
Ainsi, face au risque d’effondrement du bloc central, le chef de l’Etat semble avoir été « débranché » de la campagne des législatives par le premier ministre et ses alliés du camp présidentiel.
Pire, Edouard Philippe a humilié publiquement Macron ce dimanche en l’appelant à se tenir à distance de la campagne : « Je ne suis pas sûr qu’il soit complètement sain que le président de la République fasse une campagne législative », a expliqué sur BFMTV l’un des probables candidats à sa succession en 2027.
Pour cause, comme l’illustrent certains sondages, le risque d’effacement du macronisme est grand : « si les électeurs et électrices votent de la même façon le 30 juin que le 9 juin, Renaissance ne serait qualifié pour le second tour que dans 52 circonscriptions sur 577. » avance, à nouveau, Mediapart. Pas sûr dans ces conditions que le retrait du chef de l’Etat suffise.